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Pendant la guerre – la deuxième, mondiale – ma mère a fait la connaissance d’un jeune réfugié juif de l’Europe de l’Est.
Comme bon nombre de Juifs de ce coin du monde, il était polyglotte. Il parlait, bien sûr, sa langue maternelle, le Yiddish. Il parlait, par pure nécessité, la langue de l’oppresseur. En l’occurrence, il s’agissait de deux langues puisque la géographie (ou faut-il parler plutôt d’histoire ?) à géométrie variable de la région avait comme conséquence des changements fréquents d’oppresseurs : il avait donc appris et le Russe et le Polonais. Et, étant donné qu’ils n’étaient jamais loin, il avait appris également à s’entretenir avec les Allemands.
De surcroît, le désir de tout son peuple de trouver un jour une terre d’asile l’avait poussé à apprendre en plus le Français et l’Anglais. Il maîtrisait donc six ou sept langues, et quand je dis ‘maîtriser’, je veux vraiment dire maîtriser : il ne s’agissait pas de connaissances rudimentaires, ne lui donnant que la capacité de se commander à manger dans un bistro.
Le fonctionnariat anglais l’a accueilli avec plaisir lorsqu’il est arrivé en Grande Bretagne. Mais loin de l’affecter au Ministère des Affaires Etrangères, ces chefs n’ont rien trouvé de mieux pour lui que le Ministère de l’Agriculture, l’Alimentation et la Pêche. Il s’y est ennuyé pendant toute la guerre.
On a parfois du mal à s’expliquer les critères animant la décision de nommer des gens à un poste plutôt qu’à un autre. Parfois, pourtant, on a beaucoup moins de mal – par exemple, pour comprendre la nomination de Mara Carfagna, ex-vedette de la porno soft, au poste de Ministre de l’Egalité en Italie, il suffit de réfléchir au caractère du chef du gouvernement et regarder la photo de la Ministre. Certaines photos, en tout cas.
En France, je me suis souvent demandé si Rachida Dati devait son bref passage au poste de Garde des Sceaux à des qualités intellectuelles, à sa compétence, plutôt qu’à des aspects peut-être moins utiles mais plus visibles. Moins utiles, en tout cas, pour l'administration de la justice.
Toutes ces belles questions me sont revenues à l’esprit cette semaine lorsque j’ai appris que Chantal Jouanno allait défendre son titre de championne de France en karaté par équipe. Une semaine plus tard, le 14, elle se présente en tête de liste UMP pour les élections régionales à Paris, ville qu’elle connaît évidemment à fond, ayant déclaré le 21 janvier qu’elle souhaitait voir automatisé la ligne 14 du Métro, automatisée depuis son ouverture en 1998.
Quand ses autres occupations le lui permettent, Jouanno occupe aussi un poste au gouvernement de Sarko-le-Grand.
Ce qui m’a le plus surpris chez elle, et qui m’a fait penser à l’ami de ma mère, était d’apprendre la fonction qu’elle joue au Gouvernement. Elle est secrétaire d'État chargée de l'Écologie.
L’Ecologie ? Une championne de Karaté ? Et pourquoi n’est-elle pas au Ministère de la Défense ? Autrefois, on décidait parfois l’issu des batailles par combat singulier. On sait, qu’en équipe en tout cas, elle est indomptable (en France, et au moins jusqu’à la semaine prochaine).
Quel gâchis. Mais le gaspillage des talents est vraiment une caractéristique essentielle, depuis toujours, de toutes les administrations publiques.
Ça va pas à nouveau entre la Grande Bretagne et l’Argentine. Les Anglais veulent chercher du pétrole près des Iles Malouines. Les Argentins maintiennent leur revendication de souveraineté sur ces îles – ils ne se fatiguent pas de crier ‘Las Malvinas son Argentinas’.
En représailles du projet pétrolier, ils veulent imposer des redevances spéciales sur tout navire dans un port Argentin qui aurait transité par la zone contrôlée par la Grande Bretagne. La tension monte.
Cela me paraît profondément injuste. Ces petits rochers de l’Atlantique du Sud nous ont déjà fait faire une fois la guerre. J’ai l’impression qu’ils ne sont jamais satisfaits, ces Argentins. Leur victoire de 1982 ne leur suffit pas ? Grâce à cette guerre, l’Argentine s’est débarrassée d’un gouvernement autoritaire de droite ; grâce à la même guerre, nous avons été condamnés à subir le nôtre encore huit ans, jusqu’à la chute de Thatcher en 1990. Nous n’en voulons pas à l’Argentine, mais elle pourrait du moins avoir la générosité de nous épargner un renouveau de ce conflit. Nous avons déjà assez payé.
D’ailleurs, moi j’ai toujours prôné une solution que je trouve originale et intéressante du problème des Malouines. Mon idée se résume sous le slogan ‘les Malouines aux Malouins’. C’est eux qui ont eu la mauvaise idée de coloniser ces îles ; qu’ils en prennent de nouveau la responsabilité. Elles pourraient devenir un prolongement territorial de la région Bretagne, ou même de la ville de St Malo.
Et quel plaisir cela ferait à Sarko-le-grand ! Un nouvel ajout à l’Empire français. Un renversement de la tendance historique. Vous ne le voyez pas glisser sa main droite sous sa veste ? Là il aurait vraiment de quoi se mettre sur la pointe des pieds.
L’année se décompose en moments charnières. Un s’est produit hier quand, sans partir tôt, j’ai quitté le bureau sous la lumière du jour pour la première fois depuis l’automne.
Mais un autre moment que j’attends avec impatience tous les ans depuis Noël c’est le début du Tournoi des Six Nations, qui a eu lieu le weekend dernier. C’est la grande compétition du rugby international, bien plus importante que la Coupe du Monde, et si elle produit souvent d'autres matchs passionnants et pleins de tension, celui qui compte le plus pendant ces six semaines magnifiques, s’est le clash Angleterre-France. Ou France-Angleterre, à Paris, comme ce sera le cas cette année.
Ce sera d’ailleurs le tout dernier match, dans la soirée du 20 mars. J'ai donc encore cinq semaines entières pour cultiver ma hantise. L’année dernière c’était à Twickenham. J’étais dans les tribunes et j’ai donc vu l’Angleterre marquer son premier essai dans la deuxième minute, le début de ce qui est devenu plutôt une déroute qu’une défaite pour la France.
Les Bleus auront-ils leur revanche cette année ?
Qui le sait ? Samedi dernier, l’Angleterre a gagné son premier match, contre le Pays de Galles, mais n’a eu que 13 points d’avance, en ayant marqué 17 pendant la suspension d’un joueur gallois. Bon signe pour eux qu’ils ont su profiter de leur surnombre contre une équipe réduite à quatorze pendant dix minutes ; mais auraient-ils trouvé un autre chemin vers la victoire sans ce don de la part de leurs adversaires ?
Quant à la France, c’est toujours l’équipe la plus intéressante du Championnat : on ne sait jamais quelle équipe se présentera sur le terrain, même s’il s’agit des mêmes quinze joueurs. Dimanche dernier, contre l’Ecosse, nous avons vu une équipe majestueuse en première mi-temps ; en deuxième elle a fait un match nul avec l’Ecosse en 40 minutes sans grande magie, sortant gagnant du terrain grâce uniquement à leur prestation antérieure.
Que feront-ils s’ils sont obligés à jouer vraiment pendant 80 minutes ?
Toutes les questions demeurent sans réponse pour l’instant. Les cinq semaines qui viennent amèneront des éléments. Et le 20 mars, nous aurons la réponse définitive.
C’est tout le plaisir de ce grand tournoi. Un long parcours plein de surprises et de leçons. Et à la fin un grand affrontement historique. Qui aura lieu, d’ailleurs, la veille du printemps et une semaine avant le passage à l’heure d’été.
Une autre charnière. Et un autre passage vers le bonheur. Quelque soit le résultat sur le terrain.