Thursday 13 May 2010

Les bons Samaritains aux temps qui courent

Je déteste ce fait divers qui revient avec peu de variantes de temps en temps dans les médias du pauvre – et il s’agit presque toujours d’un pauvre – qui reste des heures étendu sur le trottoir d’une de nos grandes villes pendant que des foules passent à côté sans se soucier de son sort.

En sortant donc de la Garde du Nord l’autre jour, et voyant un homme par terre près du parc à vélos, j’ai eu un moment de culpabilité aigüe. Un ivre qui couvait son vin ? Un sans-abri ? Un malade ? Peut-être même un mort. J’ai eu chaud. Après tout, les sans abri en général ont l’air de s’être vraiment couchés, étendus comme dans un lit, souvent couverts de quelque chose, ne fût-ce que de bouts de carton, faute d’une vieille couverture infecte. Un ivre se couche souvent la tête sur un bras, ou en tout cas protégée de quelque manière de la dureté directe du trottoir. Cependant, ce monsieur-là avait la joue aplati à même du goudron. Donc – s’agissait-il d’un malade ou même d’un mort ?

J’ai hésité à agir en continuant de marcher, et dans quelques instants j’avais tourné l’angle, je ne voyais plus le gisant, et ma culpabilité s’est intensifiée d’encore un cran. Et tout à coup – quel soulagement – j’ai vu un véritable attroupement de policiers. Il y avait visiblement eu un accident rue Lafayette ; deux voitures de pompiers était garé avec les gyrophares allumé ; cependant l’incident devait être plus ou moins clos, puisque les policiers – dont il y en avait sept ou huit – se parlaient entre eux, bavardant, se souriant, ne se souciant manifestement de rien.

Je m’approche d’eux.

‘Excusez-moi,’ leur dis-je. Les deux les plus proches me regardent, l’air contrarié, comme si j’interrompais un travail important.

‘J’ai vu un monsieur, là-bas, devant la gare, étendu par terre, peut-être ivre mais peut-être malade.’

‘On a un accident dont il faut qu’on s’occupe,’ a dit l’un des agents.

J’ai résisté à la tentation de regarder tous leurs collègues qui, de toute évidence, ne faisaient strictement rien.

‘Mais… il ne va peut-être pas très bien… il aurait peut-être besoin d’aide…’ ai-je dit de ma voix la plus respectueuse possible.

‘Il est ivre,’ dit l’autre agent, ‘c’est la Gare du Nord. Ce sont des ivres.’

C’est soulageant, n’est-ce pas, que nous pouvons compter sur une police aussi sensible au moindre problème troublant la vie de n’importe quel citoyen, aussi humble soit-il ? C’est un investissement sûr de l’argent du contribuable.

Et une belle illustration du fait que nos sociétés ont pris à cœur la parabole du Bon Samaritain.

1 comment:

  1. Very sad story. Yes, the French Police are like that. I live in Paris and they are hardly ever there to help us when we need them.

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