Monday 16 August 2010

L'anglais, langue internationale. Et ça aurait pu être pire

Si la France et l’Angleterre ont entretenu depuis des siècles une concurrence parfois sournoise, parfois ouverte et violente, la rivalité entre leurs langues a été tout aussi intense. Cependant, au grand dam de la France, la superpuissance Américaine semble avoir résolu le conflit linguistique entièrement en faveur de l’anglais. Au moins, pour le moment.

C’est dur à avaler, surtout étant donné la prédominance du français il n’y a que deux siècles et demi. A Berlin, quand Frédéric le Grand voulait se faire une réputation d’écrivain, il se mit à écrire en français et demanda à Voltaire de l’aider. Ecrire en allemand, c’eut été se borner à un monde essentiellement provincial. En Pologne et en Russie, la cour parlait français. C’était la langue de la diplomatie. Même aujourd’hui, la traduction en anglais du terme français ‘attaché’ est – ‘attaché’. Il n’y a que la prononciation qui change, et l’utilisation de l’accent aigu, sujet sur lequel les anglophones peuvent se montrer cavaliers, qui fait parfois défaut.

Il est peut-être embêtant de voir triompher l’anglais, mais consolez-vous : cela aurait pu être bien pire. Pour comprendre cela, remontons un petit peu dans l’histoire.

L’année 878 était dure pour l’Angleterre. D’abord, parce qu’elle n’existait pas encore. Ensuite, parce que sur les quatre royaumes qui constituaient ce qui allait devenir le pays, trois étaient tombés sous domination Danoise. Seul résistait le royaume du Wessex, dans le sud et sud-ouest, sous son roi Alfred.

Les Danois, des Thierry Henri avant la lettre, n’étaient pas très fair-play. Ils ont lancé leur attaque peu de temps après Noël. Inadmissible. Personne n’est prêt à se battre au moment des fêtes. On a trop mangé, beaucoup trop bu. Le 6 janvier 878, Alfred subit une défaite cuisante lors d’une bataille autour de son palais à Chippenham. Pendant la fête des rois, vous vous rendez compte. Je n’ai pas pu vérifier s’il eut même droit à la fève. Il dut se retirer et se réfugia dans une région marécageuse, dont il y en avait pas mal à l’époque, le climat étant le même qu’aujourd’hui et le drainage beaucoup moins efficace.

Pendant plusieurs mois il s’occupa à rassembler une nouvelle armée. Enfin, au mois de mai, il lança sa propre offensive et remporta une victoire quasi miraculeuse à la bataille d’Eddington. Le pays fut partagé, entre un nouveau royaume anglais sous Alfred, composé de ses propres territoires du Wessex et l’ancien royaume de Mercie, et le ‘Danelaw’ au Nord et à l’Est, retenu par les Vikings jusqu’au règne d’Athelstan, petit-fils d’Alfred, et premier roi d’une Angleterre enfin unie.

Mais le pas décisif pour l’histoire de la langue fut prise par Alfred lui-même. C’était un grand intellectuel. Il voulut améliorer l’éducation de ses sujets et lança une campagne de distribution des plus grands textes, écrits ou traduits en Anglais. Il traduisit lui-même un texte de St Grégoire.

Il semble que c’est bien à partir de cette époque là que l’anglais devint une langue littéraire, capable d’évoluer vers ce qu’elle est aujourd’hui, le moyen de communication privilégié du monde entier.

Même les Normands, en débarquant presque trois siècles après, ne purent faire du français que la langue de la cour. Petit à petit, l’anglais qui était resté la langue du peuple, se releva et redevint la langue nationale.

Donc, si vous êtes obligés, à contrecœur, d’apprendre l’anglais en France, c’est grâce à la victoire d’Edington obtenu par ce satané Alfred.

Ceci dit, les choses n’auraient guère étaient mieux s’il avait perdu. Il y a de fortes chances que nous parlerions tous Danois aujourd’hui. Et en Suède on dit que le Danois n’est pas une langue mais une maladie de la gorge.

Mieux vaut se résigner à parler anglais.

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