Tuesday 19 January 2010

Cricket, foot et loi Charia

En 1990, Norman Tebbit, alors ministre dans le gouvernement de Mme Thatcher, a lancé l’idée d’un ‘test cricket’ pour évaluer la loyauté des communautés issues de l’immigration envers la Grande Bretagne. La question était de savoir s’ils soutiendraient l’équipe anglaise de cricket même en match contre l’équipe de leur pays d’origine. Tebbit visait surtout les immigrés d’origine pakistanaise, musulmans bien sûr, et de surcroît issu d’un pays dont l’équipe de cricket tient bien la route. Le test de Tebbit est en effet curieux, étant donné qu’il n’est même pas facile pour nous autres, nés anglais, de soutenir notre équipe, vu la qualité de ses prestations, en particulier la semaine dernière contre l’Afrique du Sud.

Tout cela m’est revenu à l’esprit en lisant les propos récents de Jean-Claude Gaudin, Maire de Marseille, sur la liesse de ces concitoyens d’extraction Algérienne lors de la qualification de l’Algérie pour la coupe du monde de foot : ‘Nous nous réjouissons que les musulmans soient heureux du match, sauf que quand après ils déferlent à 15 000 ou à 20 000 sur la Canebière, il n'y a que le drapeau algérien et il n'y a pas le drapeau français, cela ne nous plaît pas.’

Gaudin fait preuve d’exactement la même ouverture d’esprit que Tebbit dans son temps. Et aussi d’une compréhension bien limitée des règles du foot. Hélas, ces règles ne permettent pas aux tricolores de venir jouer à côté des Algériens. La victoire de l’Algérie ne doit rien à l’équipe française, et je ne vois pas ce que le drapeau français viendrait faire dans la foule qui fêtait cette victoire.

Peu de temps après les propos de Monsieur Gaudin, j’ai eu l’occasion de voir le revers de la médaille, sous la forme d’une interview dans le Times de Londres avec Anjem Choudary. C’est un bonhomme qui sourit, apparemment, parce que la loi Charia arrive en Angleterre. J’ai honte de l’avouer, mais j’ai dû rater la nouvelle de cette arrivée imminente. Peut-être que je ne lis pas les mêmes journaux.

Monsieur Choudary est chef de fil du groupe islamiste militant Islam4UK, un groupuscule marginal même à l’intérieur de la communauté musulmane : la journaliste du Times raconte qu’elle a eu du mal à trouver un café pour l’interview, puisque Choudary s’est fait interdire l’accès à la plupart des établissements de son quartier, mêmes musulmans. Il s’agit de gens qui travaillent très dur et qui méprisent peut-être quelqu’un qui critique violemment le régime actuel, tout en vivant d’allocations sociales.

Le gouvernement, lui aussi, vient de lui imposer une interdiction, celle de son groupe. C’est une des mesures les plus efficaces dont le gouvernement dispose. Pas efficace dans le sens qu’elle conduit à des résultats utiles contre les intégristes, puisqu’elle n’en produit aucun. Choudary est à sa deuxième interdiction, ayant précédemment été membre du groupe ‘Al-Muhaijiroun’, interdit en 2004. Les groupes se reforment à chaque fois, avec une autre configuration et un autre nom. L’interdiction n’est efficace que pour la bonne impression qu’elle donne du gouvernement auprès des électeurs. Mais il ne faut peut-être pas sous-estimer la portée de cet effet là.

Ce qui me frappe le plus dans tout cela c’est la symétrie entre les positions de Tebbit et Gaudin d’une part et de Choudary de l’autre. Chacun sait qu’il a raison. Chacun veut imposer sur d’autres l’adhésion à des valeurs qui ne sont pas les leurs, que ce soit l’acceptation de la loi Charia ou le refus de son pays d’origine.

Quel dommage que nous ne puissions pas envoyer tous ces gâche-fêtes dans une île bien lointaine. Ils pourraient peut-être se former en équipes sportives, et ensuite se disputer pour savoir s’ils joueraient au cricket pour faire plaisir à Tebitt ou au foot pour contenter Gaudin. Je n’ai aucune idée de ce qui ferait le bonheur de Choudary.

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