Monday, 25 October 2010

Gloire et honte des armes britanniques

Aujourd’hui, c’est la St Crépin. Tout écolier anglais connaît – ou du moins a entendu – le discours de Shakespeare, qu’il met dans la bouche du roi anglais Henri V, juste avant la bataille d’Azincourt : ‘this day is called the feast of Crispin’ et plus tard ‘we few, we happy few, we band of brothers, for he today that sheds his blood with me, shall be my brother.’ ‘Band of brothers’ est une expression qui est entrée dans la langue courante (c’était le titre d’une excellente série de par Spielberg, sous le nom français de Frères d’armes). Et ‘happy few’ est même devenu une expression de la langue française.

La semaine dernière, plus précisément jeudi 21, était le jour anniversaire de la bataille de Trafalgar.

On passe donc par un moment pas trop réjouissant pour des Français, avec trop d’anniversaires de défaites infligées par le grand ennemi historique de la France.

J’ai donc voulu offrir un brin de soulagement à mes compatriotes français en racontant l’incident le plus récent de l’histoire de la marine britannique, traditionnellement la plus puissante branche militaire du pays.

Il concerne le sous-marin, HMS Astute. Hélas, il ne s’est pas avéré très astucieux. Construit pour pouvoir rejoindre n’importe quel zone de conflit du monde, son autonomie lui permet de rester au large pendant 3000 miles nautiques. Et pourtant lors de son premier essai en mer, il s’est échoué à quelques kilomètres de sa base, sans même avoir quitté les eaux territoriales du Royaume. Le pire : il a été construit, à un cout de 1,2 milliards de livres, pour des missions furtives. Il était donc gênant de le voir, exposé à n’importe quel passant, près de l’Ile de Skye, une des principales destinations du tourisme en Ecosse.

Heureusement, tout cela s’est passé vendredi dernier. Imaginez s’il s’était produit jeudi, anniversaire de Trafalgar. Mais même vendredi – quel honte. La Royal Navy n’est vraiment plus celle qu’elle était à l’époque de Nelson.

Quelle ironie que juste à ce moment, où le déclin de la puissance maritime militaire britannique aurait permis de songer à une juste vengeance de la France pour la honte de Trafalgar, la conjoncture soit telle que la guerre entre la France et la Grande Bretagne est devenue inconcevable.

Quoique, avec Sarko-le-Grand à l’Elysée, qu’est-ce qu’on peut vraiment exclure définitivement ?

Sunday, 17 October 2010

Burqa et citoyenneté

Curieuse histoire, celle de Marlène Ruby, l’institutrice à la retraite qui a eu l’idée de proclamer les droits de l’homme en arrachant le voile de la tête d’une musulmane, d’ailleurs même pas française, en burqa.

Je comprends bien que certains pourraient bien vouloir défendre l’action de Marlène et avanceraient des arguments bien convaincants. Pour les aider, je propose donc une situation hypothétique où certains fait sont changés, mais le fond de la chose reste le même. Je trouve que c’est souvent une façon efficace de voir les points faibles d’un argument autrement spécieux.

Supposons qu’au lieu d’une femme, il s'agissait d'un homme qui avait entrepris l’action, et qu’au lieu d’une femme des Emirats, il s’en était pris à une jeune française, et qu’au lieu de lui arracher un voile, il lui avait arraché le haut d’un bikini. Après tout, il y a de nombreuses cultures à travers le monde où il est normal que les femmes se promènent seins nus. Par quel droit les pays occidentaux les obligent de se couvrir ?

Je me demande combien de gens trouveraient l’action louable, une légitime défense des droits de l’homme. Certains trouveraient même que ce serait une atteinte inadmissible à la pudeur de la victime, et que celle-ci a le droit de définir pour elle-même ce qui constitue la modestie. Ils trouveraient peut-être qu’une telle action frôle l’agression sexuelle, précisément parce qu’elle ne respecte pas les critères de modestie de la femme en question.

Il suffit d’ajouter que plusieurs de nos amies musulmanes nous ont assuré que pour elles, sortir sans se couvrir la tête les choquerait autant que de sortir nues.

Je me demande par quelle droit nous leur imposerions une idée de liberté qui nie leur désir de modestie ?

Par ailleurs, c’est avec grand plaisir que j’ai découvert que la peine pour le port de la burqa en France n’est pas seulement d’une amende (de jusqu’à 150 euros). Elle peut être assortie de, ou remplacée par, un stage de citoyenneté.

J’adore le fait que dans la France de Sarko-le-grand, l’apprentissage de la citoyenneté soit perçue comme une peine.

Tuesday, 28 September 2010

La paléontologie du paysage politique français

Deux émissions récentes à la radio anglaise, sur les hommes de Neandertal, m’ont donné beaucoup de matériel à réflexion.

D’abord, parce que les Neandertal étaient bien costauds et bien courageux. Par exemples, ils faisaient la chasse aux grandes bêtes de l’époque avec des lances qu’ils enfonçaient dans leur proie. Par conséquent, il fallait s’approcher de très près pour les tuer. Pourtant, il ne s’agissait pas de petites bêtes peureuses qui se laissaient faire, mais d’énormes animaux tels les mastodontes, plus que capables de se défendre, et qui apportaient parfois des blessures affreuses à leur agresseurs.

Courage admirable, force remarquable. Mais quant à l'intelligence, elle est nettement moins impressionnante. Des lances à lancer, encore mieux des arcs, auraient étaient bien plus efficaces, leur auraient permis de faire leur chasse à moins de péril.

Ensuite, j’ai appris qu’il est fort possible que nous avons tous du sang Neandertal, qu’il y a eu assez de croisement entre homo sapiens et les Neandertal pour bien mélanger nos gênes.

Et puis j’ai appris que si nous avons trouvé des traces de ces ancêtres partout en Europe et jusqu’en Asie Centrale, c’est en France que nous avons découvert le plus de restes.

Ils avaient sans doute aussi le don de la langue, mais probablement à un niveau assez restreint.

Et enfin, l’un des savants a émis l’opinion sédcuisantes que les Neandertal étaient les vrais Conservateurs purs de l’histoire humaine. 400 000 ans d’existence et leur technologie à la fin était la même qu’au début. Ils étaient très mal placés pour résister à l’invasion, venue d’Afrique, des homo sapiens avec leurs arcs et leurs outils bien plus évolués et efficaces.

Tout cela m’a fait naître une idée que je tiens absolument à vous soumettre, histoire de voir si elle tient debout.

Le comportement de la droite française m’a toujours paru incompréhensible, primitive et intellectuellement pauvre.

Est-ce que l’explication ne serait pas que le sang Neandertal, déjà un peu concentré en France, s’exprime surtout dans les rangs de l’UMP ? Evidemment, en plus petit dans le cas de Sarkozy, mais avec toute sa force dans son front proéminent, son caractère bagarreur et le manque de génie de ses idées.

Des reflexions analogues s'appliquent également au problème des capacités linguistiques. Il est peut-être trop facile de prendre la confusion récente dans l’esprit de Rachida Dati entre ‘fellation’ et ‘inflation’ comme lapsus freudien, exprimant son horreur devant certaines pratiques sexuelles perçues comme aussi perverses qu’une abomination économique, mais est-ce qu’elle ne trahit pas plutôt une composition génétique peu apte à la maîtrise de la parole ?

Et puis toute cette hargne contre les Roms – ne s’agirait-il pas d’une mémoire atavique des dangers d’une invasion d’un peuple étranger si menaçante pour les Neandertal, lorsqu’il s’agissait des homo sapiens, que leurs descendants gardent une peur irrationnelle de tout ce qui vient d’ailleurs ?

Pour moi j’ai le sentiment de voir enfin clair dans le phénomène UMP inexplicable jusque là.

Si je trouvais désormais une explication aussi convaincante du mystère du PS, encore plus bizarre dans ses comportements que l’UMP, j’aurai l’impression d’avoir vraiment franchi un cap important dans ma compréhension du paysage politique français.

Saturday, 18 September 2010

Rachida, Brice et la gymnastique intellectuelle et émotionelle

Le cinéma, le théâtre, un bon roman, ce sont d’excellents moyens pour se distraire un moment, parfois même pour s’instruire. Rien, cependant, n’est capable de nous émouvoir autant que le spectacle perpétuellement renouvelé et toujours étonnant de la politique.

Où, hors une fête foraine, trouverait-on ces revirements vertigineux qui nous coupent le souffle tout en nous amusant et nous révélant le fond de l’esprit humain ? Et je ne parle pas des revirements que font nos politiques – je parle de ceux qu’ils nous obligent à accomplir nous-mêmes.

Prenons le cas de Rachida Dati, par exemple. C’était la fille gâtée de Sarko-le-Grand, parent trop indulgent contraint à la longue à la punir en l’envoyant à Strasbourg au parlement européen. Député européen – qui n’accepterait pas de se sacrifier et prendre la place de Dati ? Surtout si, de surcroît, cela nous permet de vivre à Strasbourg, haut-lieu culturel du monde comme tous ceux qui connaissent la ville sont contraints d’avouer ?
Rachida - faut-il revoir nos impressions ?

Eh, ben, Rachida n’était pas contente. Et elle s’est exprimée en termes absolument explicites avec une amie, à un moment où elle portait toujours le micro, allumé, d’un journaliste.

C’était un incident qui a quelque peu affirmé notre perception de la belle Rachida comme quelqu’un auquel il manquait, comment le dire, un petit soupçon de maturité.

Et aujourd’hui, tout cela change.

Brice Hortefeux, Ministre de l’Intérieur, tient des propos qui frôlent le racisme. Et qui saute dans la brèche avec son épée dénonciatrice si ce n’est notre Rachida ? Et elle mène son combat avec lucidité et subtilité, en félicitant – sur RTL, allez voir – le Ministre du ‘courage’ avec lequel il a présenté ses excuses. C’est comme si on félicitait un lycéen sur l’élégance avec laquelle il avait raté son bac.

Et la fameuse burka ? ‘Il y a des sujets graves en France – le chômage – la crise financière …’ nous dit-elle, ‘je trouve qu’il y a, pour moi, des priorités beaucoup plus importantes pour les français et la vie des français.’

Que dire ? Si la petite fille qui lançait ces jouets de son landau est devenue un vrai leader, un personnage d’état, posé, profond, une voix de modération, tout l’ordre naturel des choses est bouleversé. La mer est tombée dans le ciel et les arbres dégorgent de poissons.

A part les fêtes foraines, il n’y a que la politique qui puisse nous faire connaître de telles émotions.

Wednesday, 25 August 2010

Les microbes, antidote à l’arrogance

L’être humain est beaucoup trop sûr de lui, en tant qu’espèce. Il est temps de mettre fin à notre arrogance, d’apprendre un peu d’humilité.

Pendant presqu’un milliard d’années, il n’y eut aucune trace de vie sur terre. Ensuite, il y a à peu près 3,8 milliards d’années, apparurent les premiers organismes vivants – tous des microbes. Pendant les trois milliards d’années suivantes, ils sont restés seuls sur terre (dans la mesure où on peut parler de ‘solitude’ dans le contexte d’un si grand nombre d’organismes, affichant une telle diversité). Quant à l’homme, cela ne fait que quelques centaines de milliers d’années que nous sommes là. Des parvenus, quoi, dans un monde qui appartient aux microbes.

D’ailleurs, la situation actuelle nous offre encore des preuves de cet état des choses. La masse totale des microbes sur terre aujourd’hui fait plus de 5000 fois le poids de l’humanité entière. Même à l’intérieur de chacun de nous, 90% des cellules dans nos corps sont des microbes. Les cellules qui sont proprement les nôtres ne constituent que les 10% restants.

C’est donc avec beaucoup d’intérêt que j’ai lu ce matin les conclusions d’une équipe des scientifiques de la Lawrence Berkeley National Laboratory en Californie sur la disparition, apparemment quasi-miraculeuse, du pétrole versé dans le Golfe du Mexique par BP. Cette disparition était en réalité complètement naturelle est le fait de microbes pour lesquels le pétrole est une véritable friandise. Leur population s’est agrandi de façon spectaculaire depuis l’accident et ils réduisent de moitié la quantité de pétrole dans la mer tous les trois jours.

Si nous avons besoin d’une leçon d’humilité, en voilà une. Microbes, je vous salue. Je vous félicite de votre dévouement et du succès extraordinaire dont il a été couronné. Je vous remercie d’avoir si bien réparé les dégâts dont mon espèce a été responsable. Je suis désolé du dérangement que notre présence vous cause.

Surtout, ne vous inquiétez pas trop : étant donné notre façon de nous comporter, elle ne devrait pas vous gêner encore très longtemps.

Monday, 16 August 2010

L'anglais, langue internationale. Et ça aurait pu être pire

Si la France et l’Angleterre ont entretenu depuis des siècles une concurrence parfois sournoise, parfois ouverte et violente, la rivalité entre leurs langues a été tout aussi intense. Cependant, au grand dam de la France, la superpuissance Américaine semble avoir résolu le conflit linguistique entièrement en faveur de l’anglais. Au moins, pour le moment.

C’est dur à avaler, surtout étant donné la prédominance du français il n’y a que deux siècles et demi. A Berlin, quand Frédéric le Grand voulait se faire une réputation d’écrivain, il se mit à écrire en français et demanda à Voltaire de l’aider. Ecrire en allemand, c’eut été se borner à un monde essentiellement provincial. En Pologne et en Russie, la cour parlait français. C’était la langue de la diplomatie. Même aujourd’hui, la traduction en anglais du terme français ‘attaché’ est – ‘attaché’. Il n’y a que la prononciation qui change, et l’utilisation de l’accent aigu, sujet sur lequel les anglophones peuvent se montrer cavaliers, qui fait parfois défaut.

Il est peut-être embêtant de voir triompher l’anglais, mais consolez-vous : cela aurait pu être bien pire. Pour comprendre cela, remontons un petit peu dans l’histoire.

L’année 878 était dure pour l’Angleterre. D’abord, parce qu’elle n’existait pas encore. Ensuite, parce que sur les quatre royaumes qui constituaient ce qui allait devenir le pays, trois étaient tombés sous domination Danoise. Seul résistait le royaume du Wessex, dans le sud et sud-ouest, sous son roi Alfred.

Les Danois, des Thierry Henri avant la lettre, n’étaient pas très fair-play. Ils ont lancé leur attaque peu de temps après Noël. Inadmissible. Personne n’est prêt à se battre au moment des fêtes. On a trop mangé, beaucoup trop bu. Le 6 janvier 878, Alfred subit une défaite cuisante lors d’une bataille autour de son palais à Chippenham. Pendant la fête des rois, vous vous rendez compte. Je n’ai pas pu vérifier s’il eut même droit à la fève. Il dut se retirer et se réfugia dans une région marécageuse, dont il y en avait pas mal à l’époque, le climat étant le même qu’aujourd’hui et le drainage beaucoup moins efficace.

Pendant plusieurs mois il s’occupa à rassembler une nouvelle armée. Enfin, au mois de mai, il lança sa propre offensive et remporta une victoire quasi miraculeuse à la bataille d’Eddington. Le pays fut partagé, entre un nouveau royaume anglais sous Alfred, composé de ses propres territoires du Wessex et l’ancien royaume de Mercie, et le ‘Danelaw’ au Nord et à l’Est, retenu par les Vikings jusqu’au règne d’Athelstan, petit-fils d’Alfred, et premier roi d’une Angleterre enfin unie.

Mais le pas décisif pour l’histoire de la langue fut prise par Alfred lui-même. C’était un grand intellectuel. Il voulut améliorer l’éducation de ses sujets et lança une campagne de distribution des plus grands textes, écrits ou traduits en Anglais. Il traduisit lui-même un texte de St Grégoire.

Il semble que c’est bien à partir de cette époque là que l’anglais devint une langue littéraire, capable d’évoluer vers ce qu’elle est aujourd’hui, le moyen de communication privilégié du monde entier.

Même les Normands, en débarquant presque trois siècles après, ne purent faire du français que la langue de la cour. Petit à petit, l’anglais qui était resté la langue du peuple, se releva et redevint la langue nationale.

Donc, si vous êtes obligés, à contrecœur, d’apprendre l’anglais en France, c’est grâce à la victoire d’Edington obtenu par ce satané Alfred.

Ceci dit, les choses n’auraient guère étaient mieux s’il avait perdu. Il y a de fortes chances que nous parlerions tous Danois aujourd’hui. Et en Suède on dit que le Danois n’est pas une langue mais une maladie de la gorge.

Mieux vaut se résigner à parler anglais.

Monday, 9 August 2010

Le 9 août, anniversaire génant

Deux fois par an, à trois jours d’intervalle, il m’arrive de sourire, d’un sourire un peu jaune j’avoue, de l’histoire de l’intervention occidentale en Iraq.

En 2002 et 2003, les préparatifs à l’invasions ont divisé la Grande Bretagne de fond en comble. Mais si c’était une époque troublante pour le pays, c’est un souvenir personnel qui fait que j’y pense de temps en temps, et sans aucun plaisir.

Nous avons tous connu des moments dont nous nous souvenons avec honte longtemps après. L’un de ces moments, pour moi, s’est produit pendant un diner, entre collègues, dans un petit hôtel du Yorkshire. Nous assistions à un congrès dans la pittoresque ville de Harrogate, mais toutes les chambres de la ville étaient déjà prises. Nous nous sommes donc trouvés dans un village féérique à quelques kilomètres de la ville, tout en pierre grise, caché au fond d’une des vallées vertes, boisées par endroits, ouvertes par d’autres, chacune avec leur petite rivière avec un pont en pierre taillée, vallées qu’on appelle les Dales dans le parler local, nom qu’elles ont donné à cette magnifique contrée, l’une des plus belles du pays.

A table, la discussion a viré sur la question de la guerre dont personne ne doutait plus qu’elle allait éclater d’un jour à l’autre. Nous étions presque aussi sûr de la participation britannique à l’invasion, malgré l’opposition massive dont avait fait preuve le peuple.

Un de mes meilleurs amis était à table avec nous.

‘Nous ne pouvons quand même pas laisser des armes de destruction massive à Saddam,’ disait-il.

‘Mais il n’en a pas,’ répondis-je.

‘Comment le sais-tu ?’

‘Parce que l’ONU est en train d’en chercher, sur le terrain, et n’en a pas trouvé. Ce serait ridicule de partir en guerre pour éliminer une menace qui n’existe pas.’

‘Ben, il faut que tu commences à t’habituer à l’idée que cette guerre, elle se fera, que tu le veuilles ou non.’

Pour une raison que je peux m’expliquer, cette réponse m’a particulièrement irrité, et j’ai répondu avec chaleur, ‘j’espère que les familles des milliers de morts que nous allons faire, surtout de civils mais aussi de nos propres soldats, pardonneront d’avoir agi de façon si légère.’

Malheureusement, je l’ai dit fort – mon ami était à l’autre bout de la table – et par coïncidence, il y a eu un silence dans la petite salle à manger juste au moment où j’ai parlé. Mon hostilité envers un ami proche et loyal fut donc étalé devant tout le monde, collègues et étrangers. Il y eut un instant de gêne partagé par tout le monde dans le restaurant, avant que quelqu’un ait la présence d’esprit de relancer la conversation sur d’autres thèmes.

L’ami en question a sans doute oublié la conversation. Il a de toute façon changé entièrement de position et trouve l’intervention en Iraq injustifiée et profondément contre-productive, comme tout le monde sauf les partisans irréductibles de Bush et de Blair. Mais à chaque fois que je repense à ce moment, je ressens la même gêne de m’être laissé emporter par ma colère, et d’avoir oublié que l’amitié vaut bien l’effort de se taire de temps en temps, même sur des questions qui nous tiennent à cœur. De toute façon ma passion n’allait service à strictement rien.

Et quelles sont les deux dates auxquelles je me souviens plus particulièrement de tout cela ? Et bien, le 6 août et le 9, aujourd’hui. Pourquoi ? Parce qu’il s’agit de l’anniversaire des seules deux fois où l’humanité s’est vraiment servie d’armes de destruction massive, en larguant des bombes nucléaires en 1945 d’abord sur Hiroshima et ensuite sur Nagasaki.

La belle ironie est que ce n’était pas les Iraquiens, ni des intégristes musulmans, ni des supposés terroristes qui ont tué les centaines de milliers qui sont morts sur le coup ou des suites du bombardement. Au contraire, c’était précisément les deux pays qui ont mené l’intervention en Iraq pour empêcher l’utilisation de ce genre d’armes par un pays qui n’en avait pas : les Etats Unis appuyés par la Grande Bretagne.

Ce soir je réfléchirai aux paradoxes de la politique internationale. Je me demanderai si les Etats Unis et la Grande Bretagne ne profiterait pas d’apprendre un peu plus de retenue. Mais je me demanderai si moi aussi j’en ai appris, depuis cette lointaine soirée de 2003 dont je ressens toujours une honte si vive.

Saturday, 31 July 2010

Corridas catalanes et romaines

Les choses bougent en Europe du Sud. La Catalogne rejette les corridas ; par contre, en Italie une vieille bête est obligée de se traîner devant un matador habile qui lui inflige un coup peut-être fatal. Cela peut sembler incohérent, mais je suis ravi des deux nouvelles.

J’adore le terme ‘tauromachie’. Son origine grecque lui donne un air érudit, presque intellectuel. Et pourtant ce qu’il représente est un soi-disant sport qui consiste a rendre fou une bête par la torture et ensuite la mettre à mort. Il est curieux qu’elle trouve encore des défenseurs. Je salue donc la Catalogne d’avoir pris la décision de l’interdire à partir de janvier 2012. L’Espagne est si moderne dans tant de ses valeurs, mais en ce qui concerne cette tuerie elle refuse de sortir de la barbarie. Qui sait. Peut-être que dans quelques années elle se laissera moderniser également de ce point de vue, en suivant l’exemple de cette belle région – désolé : nation – je ne veux surtout pas vexer les Catalans.

Entretemps, en Italie Berlusconi approche de son moment de la vérité. Son matador présumé ? Un ancien collaborateur et allié, ancien leader du parti postfasciste, Gianfranco Fini. C’est un personnage remarquable, qui s’est réinventé comme porte-parole d’une centre-droite plutôt libérale. Et je veux dire ‘libéral’ autant du point de vue social qu’ économique.

Cette histoire me rappelle le soir où un ami français est venu me rejoindre dans la petite ville d’Aoste, traditionnellement francophone quoique Italienne. Il souriait et je lui ai demandé la raison.

‘A la frontière,’ m’a-t-il dit, ‘j’ai demandé si je pouvais changer des francs en lires quelque part malgré l’heure tardive.’ Et oui, c’était au mauvais vieux temps avant Schengen et la monnaie unique. ‘Le douanier m’a répondu « tutto si può »’.

‘Tutto si può’. Tout est possible. Cela devrait être la devise italienne. Convertir un fasciste en défenseur des valeurs républicaines ? En Italie, cela n’a rien d’impossible.

En tout cas, si le coup est porté à Berlusconi, pourquoi s’interroger sur sa source ? Au moins lui a des moyens de se défendre bien plus solides qu’un pauvre taureau blessé. Et sa chute nous priverait de quelque chose de bien moins utile.

Une corrida à ne pas interdire, voire à encourager ? Celle, métaphorique, où Berlusconi serait la victime. Aiguise bien ton épée, Fini.

Monday, 26 July 2010

Libertés : la majorité doit protéger celles des minorités

Est-ce qu’il est temps que la lutte pour les droits de l’homme passe à un autre stade supérieur ? Au moins dans les pays démocratiques ?

Je pose la question parce qu’il me semble que la plupart des droits fondamentaux sont plus ou moins acquis de nos jours. Par cela je ne veux pas dire qu’on peut baisser la vigilance : acquis ou non, tout droit peut nous être retiré et il faut être prêt à le défendre. Mais je trouve qu’il y a d’autres droits que nous sommes loin d’avoir obtenus et pour les obtenir, il faut une lutte bien plus dure puisqu’elle se passera d’abord et surtout à l’intérieur de chacun d’entre nous.

Pour ce qui concerne les droits fondamentaux, prenons comme exemple la liberté d’expression, dont Sören Kierkegaard disait que c’est celle que les gens exigent pour compenser la liberté de pensée qu'ils préfèrent éviter. Kierkegaard n’avait peut-être pas tort, mais il me semble quand même que la liberté d’expression reste essentielle. Il faut pouvoir dire au pouvoir tout ce qu’on pense de lui, même si en face on ne nous écoute pas.

Il est donc important de défendre cette liberté. Si un journal danois publie des dessins de Mahomet, la presse française a le droit de les reproduire. Mais c’est là qu’on passe au prochain stade de la lutte pour les libertés. Car qui dit ‘droit’ ne dit pas ‘obligation’. Si on a le droit de mettre les dessins danois à la une de nos journaux, on a également le droit de dire ‘oui, d’accord, mais est-ce que cela aurait vraiment une utilité quelconque ? Ou est-ce que leur seul but est d’emmerder la minorité musulmane ? Si on se montrait moins mal élevés que les Danois et ne les publiait pas ?’

En fait, c’est là ce que je vois se définir la prochaine étape de l’évolution des droits de l’homme. On a établi le principe que c’est la majorité qui décide de la composition du gouvernement, c’est la majorité qui décide des lois, c’est la majorité qui donne à la société une forme à son image. C’est un énorme progrès qu’on en soit arrivé là, que ce ne soit plus quelques nobles et quelques ecclésiastiques qui prennent toutes ces décisions. Mais la prochaine étape est celle où la majorité qui se montre plus éclairé, et surtout plus généreuse, que la minorité dont elle a pris l’autorité. Bref, elle se montrera résolue à défendre les droits de la minorité, des minorités, aussi farouchement que les siens.

En France, elle comprendra que le souhait de 1800 femmes de porter le niqab est un droit à respecter, pas un abus à réprimer. En Angleterre, elle comprendra que la liberté d’expression ne s’applique pas uniquement à ceux dont les idées sont conformes aux notres. Rien ne serait plus facile que d’accorder des droits à ceux qui exprime nos propres idées ; le défi est d’accorder les mêmes droits à ceux qui nous interpellent, que ce soit des députés européens britanniques d’extrême droite invités à s’exprimer sur la BBC, ou des islamistes revendiquant un nouveau califat.

Ceci dit, agir contre des minorités minuscules ne coûte pas grand’ chose aux gouvernements et distrait bien leurs concitoyens d’autres questions, peut-être plus troublantes, telles que le chômage, la dégradation de nos services publiques ou les inégalités de nos sociétés. Peut-être que pour nous aussi c’est plus facile d’interdire le niqab ou nier le droit à la parole à des extrémistes que de faire face aux vraies difficultés de base auxquelles nous sommes confrontées.

La question est de savoir si ce sentiment de confort vaut ou non l’abandon de principes fondamentaux de la liberté universelle.

Tuesday, 13 July 2010

Sarko : les affaires financières font honneur à la France

Vertigineuse, cette chute dans les sondages de l’excellent Monsieur Sarkozy.

Gros titre de Libération : ‘Sondage : Sarkozy chute de 13 points’. Mais là ses avis favorables étaient à 41%. C’était en février 2008.

‘Sarkozy au plus bas’ titrait Le Monde. Mas il était encore à 38%. Quand ? en février de cette année.

Aujourd’hui il n’y a que 32% des Français qui lui font confiance. Même Martine Aubry le devance – Martine Aubry. S’il ne réussit rien d’autre, c’est déjà un exploit de la part de Sarkozy d’avoir rendu Aubry éligible.

Le plus étonnant, vu de l’Angleterre, est le dernier chapitre de cette série passionnante d’accidents à s’être déferlés sur Sarko-le-Grand. C’est l’histoire des 150 000 euros qui auraient, ou qui n’auraient pas, été versés par Liliane Bettencourt à l’UMP avec ou sans l'aide d'Eric Woerth.

Quelle hommage à la probité des Français ! En Angleterre, Michael Ashcroft, une des forces du parti Conservateur et aujourd’hui une des ses vice-présidents, est devenu Baron et membre de la Chambre des Lords en 2000. Officiellement domicilié à Belize depuis des années, il ne payait d’impôts que sur une partie minime de son revenu. Il s’est engagé a régulariser ses affaires fiscales, en contrepartie de son élévation aux Lords.

Mais régulariser ne veut pas nécessairement dire mettre fin à l’arrangement avec Belize qui lui permettait de mettre une si grande partie des ses revenus à l’abri de toute fiscalité. Ce n’est que depuis une semaine, et sous la menace de se voir exclu des Lords, qu’il ait accepté de se faire officiellement domicilier en Grande Bretagne et donc payer ses impôts. En tant que membre d’une des Chambres du Parlement, il comptait légiférer pour nous tous, y compris sur notre fiscalité, sans y être sujet lui-même.

Pendant ses dix ans de pouvoir sans obligation, il a donné, ou du moins une de ses sociétés a donné, 5,1 million de livres au parti Conservateur.

Et la bagatelle de 150 000 euros fait un tel scandale en France ? Quel honneur à la France et son engagement envers une transparence financière parfaite.

Sunday, 27 June 2010

La ressemblance franco-anglaise et l'histoire du colonialisme

Le 30 janvier 1972, des parachutistes anglais ont fait irruption dans la quartier du Bogside, dans la ville de Derry de l’Irlande du Nord. A la fin de l’après-midi, treize civils avaient été tués (un quatorzième est mort par la suite de ses blessures).

Le 30 janvier était un dimanche, et le jour est entré dans l’histoire sous le nom de ‘Bloody Sunday’.

Trente-huit ans plus tard, le 15 juin 2010, nous avons appris les conclusions d’une enquête menée par Lord Saville sur plus de dix ans, et qui a décidé que les victimes du 30 janvier avaient été tuées illégalement. Les parachutistes pourraient désormais se trouver poursuivis pour meurtre.

En 1972, l’IRA, l’armée irlandaise républicaine, était moribonde. Le soir même de ce dimanche-là, des centaines de jeunes hommes se portèrent volontaires, dont Martin McGuiness, aujourd’hui Premier Ministre Adjoint dans le gouvernement de l’Irlande du Nord. Ce renouveau de l’IRA garantit que les ‘Troubles’ allaient durer encore 25 ans et coûter la vie à 3500 personnes.

Il a fallu 38 ans pour en arriver là. Et le pire est que ce n’était même pas le premier ‘Bloody Sunday’ de l’histoire tragique de la présence anglaise en Irlande. Dimanche 21 Novembre 1920, l’IRA tua quatorze agents britanniques à Dublin. L’après-midi, des soldats ouvrirent le feu sur le public à un match de football Gaélique, en tuant quatorze civils – l’égalité du nombre était sans doute une coïncidence étant donné que les soldats tirèrent plus ou moins arbitrairement dans la foule. Les soir, trois prisonniers moururent assommés par des gardes qui empêchaient leur ‘tentative d’évasion.’

Mais ce genre d’événement n’est pas du tout limité à l’Irlande ou à l’impérialisme britannique. Pierre Vidal-Naquet, l’historien français mort en 2006, estimait qu’il y a eu des centaines de milliers de victimes de torture par l’armée pendant la guerre d’indépendance de l’Algérie. L’impact de ces événements a été presqu’aussi dévastateur pour les soldats que pour leurs victimes. Un des cousins de ma femme est parti au service militaire jeune, joyeux et dynamique ; il est revenu terne, déprimé, suicidaire. Il est mort trop jeune, alcoolique, divorcé et ayant été incapable de se bâtir une carrière égale au potentiel qu’il avait affiché avant son départ en Algérie.

Dans un blog précédent j’avais parlé de la ressemblance des Anglais et les Français en 1940, surtout dans leur manque d’enthousiasme pour une nouvelle guerre si peu de temps après la fin de celle d’avant, si sanglante. J’avais écrit que ‘c’était le moment où deux empires tiraient à leur fin, deux empires qui n’avaient profité que marginalement à leur peuple.’ L’empire britannique à son plus haut point avait généré autour de 10 livres par an par personne, une somme infime.Il avait fourni le moyen de faire fortune à une très petite minorité ; c’était pourtant la vaste majorité qui avait souffert pendant la Grande guerre et qu’on appelait à de nouveaux sacrifices en 1940. Des sacrifices de la part de gens modestes, au nom de puissances impériales qui avaient tenu très peu de promesses à leur égard.

Ce n’était pas très inspirant, et cela explique, à mon avis, le manque d’engouement des soldats anglais et français en 1940 et les défaites qui s’ensuivirent.

Deux empires qui n’inspiraient plus grand’ chose chez leurs citoyens, et qui se comportaient avec brutalité envers leurs sujets. Une image pas très édifiante, plutôt à oublier aussi vite que possible qu’a fêter.

Il est donc curieux que dans les deux pays des hommes politiques et des historiens revendiquent un revalorisation de l’histoire impériale de leur nation, en montrant les bienfaits du colonialisme. En France, c’était la loi du 23 février 2005 imposant l’enseignement du ‘rôle positif de la colonisation française Outre-mer’. En Grande Bretagne, c’est la décision de notre nouveau gouvernement de donner à Niall Ferguson, historien révisionniste, la tâche de réformer l’enseignement de l’histoire dans les écoles anglaises avec le but de valoriser le rôle de la culture européenne et ses empires en façonnant la civilisation mondiale actuelle.

Il s’agit de deux empires dont la fin sanglante a suivi un échec militaire historique. Est-ce que certains de nos politiques sont si dépourvus d’idées nouvelles qu’ils doivent en chercher des anciennes dans une source aussi triste ?

Sunday, 20 June 2010

L'Appel du 18 juin: la France, l'Angleterre, face au gouffre

C’était avec profond plaisir que j’ai appris que le grand Sarko allait nous honorer de sa présence, dans notre petite île britannique, vendredi dernier, lors de sa visite à notre beau premier ministre flambant neuf, David Cameron.

Ils se sont réunis pour commémorer l’Appel du 18 juin, lancé il y a soixante-dix ans par le Général de Gaulle. Celui-ci, comme tout le monde sait, sommait la France libre de continuer le combat aux côtés de Churchill et les Britanniques. De Gaulle et Churchill : rien ne fait plus plaisir que de voir deux géants du passé salués par deux grands hommes d'aujourd'hui.

Mais en attendant nous pouvons nous contenter de Cameron et Sarko.

Le curieux pour moi était de voir les parallèles entre les deux époques. L’Angleterre avait subi de coups très rudes, dont on craignait qu’ils s’avèrent mortels ; et est-ce qu’après deux matchs nuls en une semaine, l’Angleterre d’aujourd’hui ne se trouve pas face au même danger ? D’ailleurs, un de ses matchs nuls était avec les Etats Unis, où ces derniers ont montré qu’ils représentent une force croissante qui ne tardera peut-être pas à nous dépasser. Bref, exactement comme en 1940.

Quant à la France, alors et aujourd’hui, c’est le désarroi total. Une première rencontre indécisive a été suivie d’une défaite écrasante. La France, supérieure en force, s’est fait dominer par un adversaire plus agile, plus rapide dans la manœuvre, mieux organisé. Conséquence : c’est la déroute, la débâcle. Et comme en 40, aujourd’hui c’est l’effondrement qui s’ensuit. Anelka est exclu, ces co-équipiers se soulèvent contre cette décision, les conflits à l’intérieur du groupe, jusque-là occultés, explosent avec la colère et le départ de Robert Duverne.

Il est temps de s’organiser pour éviter une prise de pouvoir sur le foot français d’un nouveau Pétain. Il est temps de préparer la résistance. A quoi songe Sarko ? Il était déjà à Londres. Il aurait fallu lancer tout de suite un nouvel Appel aux Français.

Friday, 11 June 2010

La France et l'Angleterre : la guerre souligne leur ressemblance

Je viens de terminer un livre assez curieux, The Making of Modern Britain par Andrew Marr. L’auteur est présentateur à la BBC et le livre est en fait tiré d’une série télévisée qu’il avait consacrée à l’histoire de la Grande Bretagne au vingtième siècle. Livre de vulgarisation, bien sûr, mais bien conçu et bien écrit, il fournit de temps en temps des aperçus qui m’ont interpellé. C’était le cas, en particulier, de ce qu’il m’a appris sur l’idée assez mitigée que se faisait Churchill sur le comportement du soldat britannique pendant la deuxième guerre mondiale.

Or il est depuis longtemps à la mode chez les Anglo-Saxons de se moquer royalement de l’esprit martial français. Pour nous, la principale stratégie militaire française en face de l’ennemi est la capitulation. Nous nous racontons l’histoire du général Weygand qui, après la capitulation de mai 1940, avait annoncé qu’avant septembre, l’Angleterre aurait ‘le cou tordu comme un poulet’. Churchill répond dans un discours devenu célèbre : ‘some chicken’ (pause, quelques applaudissements) ; ‘some neck’ (délire dans la salle).

Remarquons au passage que Weygand parle de l’Angleterre, en oubliant que le Royaume Uni comporte trois autres nations. Et pourtant les Ecossais ne se lassent jamais de parler de leur ‘vieille alliance’ avec la France, dirigée bien sûr contre l’ennemi commun anglais. Quelle honte que certains Français ne semblent même pas faire la différence entre l’Angleterre et l’Ecosse (ceci dit, ce manque de respect envers les Ecossais est loin d’être ce qu’il y a de plus honteux dans la carrière de Weygand).

Donc le mythe veut que l’Angleterre (avec un certain soutien de l’Ecosse, du Pays de Galles, de l’Irlande du Nord, pour ne pas parler du Canada, de l’Australie, de l’Inde, et ainsi de suite) a soutenu seule le combat contre l’Allemagne hitlérienne de mai 1940 jusqu’en décembre 1941, moment de l’arrivée – tardive comme d’habitude – des Etats Unis dans la guerre.

Comme tous les mythes, il a sa part de vrai. La population civile, comme en France, a fait preuve d’un grand courage et a subi des privations et des souffrances réelles pour tenir jusqu’à la fin. Mais il a aussi sa part de faux. L’armée britannique s’est fait battre par des forces inférieures en nombre, allemandes en Afrique du Nord et japonaises à Singapour. Sir Alexander Cadogan, du Ministère des Affaires Etrangères, écrivit dans son journal de bord ‘Nos soldats sont des amateurs lamentables, en face de professionnels’ et ‘notre armée est un objet de dérision du monde entier.’

Il paraît que le soldat britannique n’était pas plus apte au combat aux années quarante que son homologue français. Tout ce qui séparait le destin des deux pays n’était peut-être que ce qui les séparait physiquement, l’obstacle a l'invasion que représentait la Manche.

Est-ce que cela devrait nous étonner ? Les deux pays étaient exsangues après la Grande Guerre, vingt ans auparavant. En Grande Bretagne, les hommes politiques disaient de cette guerre qu’elle allait nous amener ‘un pays digne de héros’. En fait ces héros avaient connu le chômage, la misère, même la faim. C’était le moment où deux empires tiraient à leur fin, deux empires qui n’avaient profité que marginalement à leur peuple. Et ces mêmes peuples devaient se lancer vers de nouveaux sacrifices avec enthousiasme ?

Pour moi ce n’est pas du tout étonnant que ce soit les Russes et les Américains qui ont mis de l’acharnement dans les combats. Les uns étaient aux abois, les autres avaient derrière eux une société en plein essor.

Il faut leur être reconnaissant de nous avoir sortis de nos difficultés mais je comprends entièrement ces pauvres poilus, ces pauvres Tommys, qui n’ont pas fait preuve d’un zèle égal au leur. Une fois par génération, des chefs les envoyaient au Calvaire au nom de structures impériales dépassées et qui ne profitaient de toute façon qu’à eux.

Ils en avaient franchement marre. Ils avaient raison.

Monday, 31 May 2010

La presse anglaise et les malheurs d’un ministre gai

Qu’est-ce que ça bouge en Angleterre, mon beau pays d’ordinaire si calme, si conservateur.

Ça ne fait pas encore trois semaines que nous avons notre nouveau gouvernement Conservateur – Libéral Démocrate et pourtant il a déjà subi sa première perte : David Laws, ‘Chief Secretary to the Treasury’, a démissionné samedi.

Le Chief Secretary c’est le numéro deux du ‘Trésor’, le Ministère des Finances, seul ministère à avoir deux ministres au Cabinet. Notre pays de boutiquiers prend le fric au sérieux. Le rôle du Chief Secretary c’est de veiller au niveau des dépenses, ce qui équivaut dans la conjoncture actuelle à appliquer les réductions budgétaires profondes auxquelles nous nous attendons tous.

Or je ne sais que très peu sur David Laws et je ne suis pas du tout partisan de notre nouveau gouvernement. Ceci dit, Laws a la réputation d’être compétent et droit. Personnellement, j’aurais préféré qu’on lui donne au moins le temps de se prouver apte ou inapte avant de le chasser.

Pourquoi donc est-il parti ? Très simplement, parce qu’il est gai. Eh oui. Ce n’est ni illégale ni même condamné d’être gai en Angleterre de nos jours. Plusieurs ministres du dernier gouvernement l’étaient, au moins un du gouvernement actuel l’est. Quand un de nos quotidiens avait monté, il y a plus de dix ans, une campagne contre le premier de nos ministres à être ouvertement gai, le journal a été contraint à l'abandonner par le poids des opinions contraires exprimées par ses lecteurs dans un sondage qu’il avait organisé lui-même.

La différence pour Laws est qu’il avait voulu garder le secret sur sa sexualité. On peut critiquer ou approuver sa décision mais il me semble qu’il s’agit d’une décision qui revient uniquement à lui. Malheureusement, pour protéger le secret, au lieu d’établir un ménage officiel avec son conjoint et se faire rembourser les frais comme prévu par la réglementation parlementaire, il a présenté le conjoint comme propriétaire et s’est fait rembourser un soi-disant loyer. Tout indique que cette approche ne lui a pas valu un centime de plus que ce qu’il aurait eu de toute façon, et son but n’était que de garder le secret sur sa vie privée.

En France, évidemment, tout cela serait passé sans commentaires. Après tout, Félix Faure est mort dans les bras de sa maîtresse (magnifique le mot de Clémenceau faisant allusion à la manière de sa mort, ‘Il voulait être César, il ne fut que Pompée’). Et bien sûr Mazarine hantait l’Elysée pendant que son père naturel François Mitterand l’occupait sans que cela fasse scandale. Mais ici nous avons une presse très spéciale. L’un de ses représentants les plus toxiques est le Daily Mail qui a décidé de publier des ‘révélations’ sur le ‘cas’ Laws.

La pression médiatique a été intolérable. Laws a démissionné en tant que ministre, et selon des rumeurs il songerait même à démissionner en tant que député.

J’aimerais bien voir chuter ce gouvernement dirigé par un parti Conservateur dont les objectifs me semblent aussi pourris que toujours, les idées sociales aussi arriérées que jamais. Mais j’aimerais bien qu’on les renverse par des moyens politiques.

Quel dommage que leur première perte soit celle d’un homme apparemment honnête, cassé uniquement pour des causes liées à sa vie privée.

Wednesday, 19 May 2010

Pour lui, malgré eux

Un fait historique : le 8 mai, Sarko tient un discours à Colmar où il défend l’image des ‘malgré nous’, la première fois qu’un président ait même eu l’idée de parler d’eux.

Qui étaient ces malgré nous ? C’étaient des jeunes hommes comme mon oncle par alliance René qui ont été enrôlé de force dans l’armée allemande pendant la deuxième guerre mondiale. Quand l’Allemagne s’appropria – où, de son point de vue, récupéra – l’Alsace et la Moselle, elle traita ces régions non pas comme des territoires français occupés, mais comme des provinces réintégrés au Reich. Par conséquent, les habitants étaient perçus comme citoyens de l’Allemagne et donc sujet à l’obligation du service militaire allemand.

Certains l’évitèrent, mais c’étaient les familles qui payaient le prix : elles se trouvèrent souvent déportées en Allemagne et bon nombre n’en revinrent jamais. Dans le cas de René, son frère ainé était parti et la police lui avait fait comprendre que rien ne se passerait si lui faisait son service, mais s’il partait à son tour, les choses irait très mal pour la famille. Il a donc passé la guerre à la Luftwaffe, fait que je trouve personnellement ironique, étant donné qu’à la même époque mon père était dans la RAF anglaise.

René m’a expliqué qu’il a dû employer toute son habileté pour pouvoir réussir les examens que la Luftwaffe lui imposait – l’alternative était le front de l’Est – sans faire de zèle excessif. Malheureusement, il n’a pas pu entièrement éviter le front de l’Est : à la fin de la guerre, les Allemands n’avaient presque plus d’avions, ni de carburant, et donc la Luftwaffe n’avait plus vraiment besoin de malgré nous. Le pauvre René s’est trouvé à Königsberg, l’actuel Kaliningrad russe, où il a participé à la déroute des troupes allemandes, et est rentré à pied jusqu’en Allemagne où il a eu la chance de se faire prendre prisonnier par les Américains.

Dans tout cela, René et les milliers d’autres malgré nous ont été des victimes des Allemands et pas des collaborateurs, et c’est ce que Sarkozy a reconnu lors de son discours de Colmar. ‘Les "malgré nous" ne furent pas des traitres’, a-t-il dit. ‘Ceux qui n'ont rien fait pour empêcher cette ignominie perpétrée contre des citoyens français ont trahi les valeurs de la France, l'ont déshonorée. Vichy a trahi la France et l'a déshonorée.’

La sœur de René et sa fille ont été touchées par ce discours. Curieusement, René lui-même l’était beaucoup moins. Ça le laissait indifférent. J’avais voulu écrire qu’il s’en foutait comme de l’an quarante, mais en fait l’an quarante compte pour beaucoup dans sa vie, puisque c’était le début de sa transformation en malgré nous.

Je me demande si son indifférence envers les beaux mots du Président exprimait le sentiment, que je partage, que ce n’étaient que de beaux mots ? Je ne veux pas du tout dévaluer la grandeur d’âme du Président, que je trouve parfaitement égale à sa grandeur physique, mais au prix de me faire prendre pour un cynique, je ne peux m’empêcher d’exprimer quelques légers soupçons concernant ses mobiles.

Après tout, c’est un discours qui risque de faire plaisir surtout en Alsace. Dans les autres régions, peu de gens sont au courant de l’histoire des malgré nous.

Et depuis les élection régionales récentes, l’Alsace est la seule région de France métropolitaine gérée par l’UMP, le parti du Président.

Coïncidence ? Où est-ce que Sarko veut assurer ses bases dans la seule région qui lui reste loyale ?

Thursday, 13 May 2010

Les bons Samaritains aux temps qui courent

Je déteste ce fait divers qui revient avec peu de variantes de temps en temps dans les médias du pauvre – et il s’agit presque toujours d’un pauvre – qui reste des heures étendu sur le trottoir d’une de nos grandes villes pendant que des foules passent à côté sans se soucier de son sort.

En sortant donc de la Garde du Nord l’autre jour, et voyant un homme par terre près du parc à vélos, j’ai eu un moment de culpabilité aigüe. Un ivre qui couvait son vin ? Un sans-abri ? Un malade ? Peut-être même un mort. J’ai eu chaud. Après tout, les sans abri en général ont l’air de s’être vraiment couchés, étendus comme dans un lit, souvent couverts de quelque chose, ne fût-ce que de bouts de carton, faute d’une vieille couverture infecte. Un ivre se couche souvent la tête sur un bras, ou en tout cas protégée de quelque manière de la dureté directe du trottoir. Cependant, ce monsieur-là avait la joue aplati à même du goudron. Donc – s’agissait-il d’un malade ou même d’un mort ?

J’ai hésité à agir en continuant de marcher, et dans quelques instants j’avais tourné l’angle, je ne voyais plus le gisant, et ma culpabilité s’est intensifiée d’encore un cran. Et tout à coup – quel soulagement – j’ai vu un véritable attroupement de policiers. Il y avait visiblement eu un accident rue Lafayette ; deux voitures de pompiers était garé avec les gyrophares allumé ; cependant l’incident devait être plus ou moins clos, puisque les policiers – dont il y en avait sept ou huit – se parlaient entre eux, bavardant, se souriant, ne se souciant manifestement de rien.

Je m’approche d’eux.

‘Excusez-moi,’ leur dis-je. Les deux les plus proches me regardent, l’air contrarié, comme si j’interrompais un travail important.

‘J’ai vu un monsieur, là-bas, devant la gare, étendu par terre, peut-être ivre mais peut-être malade.’

‘On a un accident dont il faut qu’on s’occupe,’ a dit l’un des agents.

J’ai résisté à la tentation de regarder tous leurs collègues qui, de toute évidence, ne faisaient strictement rien.

‘Mais… il ne va peut-être pas très bien… il aurait peut-être besoin d’aide…’ ai-je dit de ma voix la plus respectueuse possible.

‘Il est ivre,’ dit l’autre agent, ‘c’est la Gare du Nord. Ce sont des ivres.’

C’est soulageant, n’est-ce pas, que nous pouvons compter sur une police aussi sensible au moindre problème troublant la vie de n’importe quel citoyen, aussi humble soit-il ? C’est un investissement sûr de l’argent du contribuable.

Et une belle illustration du fait que nos sociétés ont pris à cœur la parabole du Bon Samaritain.

Saturday, 8 May 2010

Kehl, Strasbourg, le 8 mai

Ah, le 8 mai. Un jour qui me remplit de nostalgie. Jusqu’à 2006, nous habitions Kehl, petit bourg du Sud-ouest de l’Allemagne en face de Strasbourg de l’autre côté du Rhin, où nous espérons retourner un de ces beaux jours.

C’est une ville qui joue depuis longtemps un rôle important dans la vie française. D’ailleurs, elle a souvent été au moins en partie française : la France avait pendant longtemps un bastion côté allemand qui lui permettait de protéger l’accès au pont sur le Rhin qui menait en territoire français. Ce territoire, c’était l’Alsace, française à l’époque et à nouveau aujourd’hui mais longtemps convoitée par l’Allemagne, qui l’occupa deux fois entre 1870 et 1940.

Ce bastion était tombé un peu en désuétude à la fin du dix-huitième siècle mais, comme bon nombre de zones extraterritoriales, jouissait d’un statut particulier en droit français. C’est donc là que Beaumarchais, celui du Barbier de Séville et le Mariage de Figaro, a établi une presse où il pouvait éditer des textes controversés sans s’exposer à trop de risque de poursuite judiciaire. C’est ainsi que la première grande édition posthume des œuvres de Voltaire fut imprimée non en France, mais dans notre petit bourg allemand de Kehl.

C’était particulièrement drôle d’être à Kehl le 8 mai. J’ai l’impression que bon nombre de Français ignorent pourquoi le jour est férié. Ils font peut-être un amalgame entre le 8 et le jour de l’Ascension en supposant que ses origines sont religieuses, comme la plupart des fêtes de notre belle société laïque. En tout cas, j’ai souvent été étonné par le nombre de personnes même à Strasbourg, où la deuxième guerre mondiale a pesé lourd, qui apprennent avec surprise que le jour n’est pas férié en Allemagne.

‘Tu croyais donc que les Allemands fêteraient notre victoire sur leur pays ?’ je leur demande.

‘Ah bon ? Parce que c’est une victoire qu’on fête ? C’était pas le Brésil qu’on avait battu en finale en ’98 ?’

Mais ils ne sont pas bêtes ces Strasbourgeois, ils pigent vite.

‘Mais… si ce n’est pas férié chez vous, ça veut dire que les magasins sont ouverts ?’

Et ben oui. Les magasins sont ouverts à Kehl le 8 mai. Et des milliers de Français viennent s’approvisionner dans notre petit bourg.

Belle image, n’est-ce pas ? Les Français prêts à mettre à côté les difficultés d’autrefois, viennent faire des courses chez des Allemands prêts à tout oublier si ça leur permet d’alléger un peu le portefeuille de leurs visiteurs.

Avouons que des rencontres entre deux grands peuples sont mieux ainsi, commerciaux, que militaires comme à l’époque de nos grands parents. On y laisse des sous, soit, mais au moins on n’y laisse pas sa peau.

Par contre, je ne suis pas sûr que cela corresponde exactement aux idées de ceux qui ont fait du 8 mai un jour férié précisément pour commémorer la dernière fois que nous avons pu nous opposer avec succès à l’Allemagne.

Thursday, 29 April 2010

Les politiciens anglais à l’école française

C’est étonnant de voir à quel point les Anglais apprennent à faire leur politique chez les Français.

En pleine effervescence électorale ici, on voit bien que le chef de file des Conservateurs, David Cameron, est allé faire son apprentissage chez Sarko-le-Grand. Toute sa politique se résume en un seul point : il préfère que ce soit lui qui gagne et que tous les autres perdent. Pour atteindre son but il promettrait n’importe quoi à n’importe qui, et il est prêt à changer radicalement de politique – de 180 degrés, si ce n’est, quelques jours plus tard, 360. Il laisse l’impression qu’au pouvoir il ne ferait strictement rien et, en plus, c’est mieux comme ça. Exactement comme Sarko, en fait.

Quant à Nick Clegg, à la tête du parti Libéral-Démocrate, c’est la grande découverte de cette campagne. Depuis les années vingt, son parti traîne en troisième position, réduit aux années soixante au ‘parti Libéral de taxi’ avec six députés qui auraient tous pu monter en un seul taxi. L’innovation de ces élections c’est une série de débats télévisés à l’américaine, entre leaders des trois grands partis. On se plaignait que notre système parlementaire devenait de plus en plus présidentiel, et ces débats n’ont qu’accéléré ce processus. Lors du premier débat, à l’étonnement de tout le monde, lui le plus de tous, c’est Clegg qui est sorti gagnant. Depuis son parti est en deuxième position dans les sondages, avec 30% des intentions, devançant le parti Travailliste de l’actuel gouvernement.

Clegg c’est Bayrou, les Libéraux-Démocrates sont le Modem. A cette différence près : eux ils ont bossé leur percée depuis des décennies, au lieu d’y consacrer que dix mois, et ils risquent de la réussir.

Quant à Gordon Brown, l’actuel Premier Ministre et leader pro tem du Parti Travailliste, il a évidemment perfectionné sa technique dans l’école de Rachida Dati. Il s’est comporté très bien avec une dame qui l’avait interpellé dans la rue hier, en restant courtois, même souriant – et ce n’est pas facile pour lui, qui a toujours l’air de manquer un peu de pratique quand il essaie de sourire. Il monte en voiture. Et il se laisse aller en injures envers cette dame, la traitant entre autres choses de vieille bigote – en oubliant que son micro était resté attaché à sa veste et était toujours ouvert. C'est du pur Dati.

Quel beau cadeau pour la presse. ‘La honte du pays’ criait un des quotidiens soi-disant populaires de ce matin, en traitant Brown d’hypocrite.

Il paraît qu’en Angleterre on croit que ces politiciens qui sourient tout le temps sont sincèrement épris des électeurs qu’ils croisent sur leur chemin. Aucun d’entre eux ne se plaint jamais après de ces gens minables, bêtes et – qui sait – bigots.

En tout cas, il doit y avoir pas mal de députés travaillistes qui depuis hier soir comprennent que le moment est arrivé de se chercher un autre travail, et en veulent à Brown. Brown lui-même doit se dire que la porte du numéro 10 Downing Street va bientôt se fermer derrière lui. Au moins cela lui donnera le temps de décider si c’était vraiment judicieux d’aller apprendre son savoir vivre politique chez Rachida.

Sunday, 25 April 2010

Le Niqab de Nantes : les choses qui comptent

Quel soulagement d’apprendre que pour la première fois la police française a agi contre le délit de conduite en état d’affichage de croyance islamique : une Nantaise qui conduisait en Niqab a écopé d’une amende de 22 euros.

Dans un pays comme la France où la criminalité est en voie de disparition, il était temps de trouver autre chose pour occuper les journées de la police. Quoi de mieux que de se pencher sur une question d’une importance primordiale qui devrait nous agiter tous, comme les coutumes vestimentaires des femmes dans les communautés minoritaires ?

C’est la course en ce moment entre l’Italie, la France et la Belgique pour savoir lequel serait le premier pays à interdire entièrement le port du voile islamique. Voilà des gens qui comprennent l’urgence de certaines questions centrales de notre époque. Ayant résolu le problème du chômage, de l’inflation, de l’endettement publique, de la crise financière, qu’est-ce qu’ils auraient de mieux à faire que d’emmerder les musulmans ? Il semble qu’en Belgique, par exemple, jusqu’à trente femmes portent régulièrement le voile islamique. Un problème social d’ordre fondamental, quoi.

Nous aussi, en Angleterre, nous nous occupons du problème de l’intégration des communautés minoritaires. Par exemple, ‘UKIP’ – le soi-disant parti de l’indépendance du Royaume Uni – vient de distribuer un dépliant montrant le visage d’un Amérindien et le slogan ‘il ne voulait pas s’occuper de l’immigration. Aujourd’hui il vit dans une réservation.’



UKIP contribue aux bonnes relations entre communautés anglaises

J’adore. Si seulement les Sioux avaient légiférer contre l’immigration anglaise. Ils auraient peut-être pu interdire le port d’habits et chapeaux noirs. Ils auraient pu installer des postes frontières et refuser l’entrée aux pèlerins du Mayflower. Je les vois bien : ‘Désolés, Messieurs Dames. Vos papiers ne sont pas en ordre. Veuillez rentrer chez vous et demander l’autorisation de débarquement en Amérique du Nord par les moyens prévus par la loi.’

Et aujourd’hui les Etats Unis parleraient Sioux. Et il n’y aurait plus de problème d’intégration des communautés dans leur grand continent.

Heureusement que des gens si éclairés, si sensibles aux besoins des autres, s’occupent des grandes questions difficiles de notre époque.

Tuesday, 13 April 2010

Fin de règne en France et en Angleterre

Intéressant que Pierre Moscovici estime qu'il existe une ambiance de fin de règne en France en ce moment. Je lui souhaite plein de bonnes choses, mais je crains qu’il ait sous-estimé la capacité de rebondir de Sarko-le-grand, surtout quand il s’agit de sa survie politique ; également, il a peut-être sous-estimé la capacité d’autodestruction du Parti Socialiste de Moscovici même

Par contre, ici en Angleterre, l’atmosphère de fin de règne imprègne tout.

Depuis longtemps je dis à tous ceux qui veulent m’écouter – et à pas mal d’autres qui préféreraient ne pas m’entendre – que si au début de la phase finale de la campagne électorale, les Travaillistes n’étaient qu’à moins de 4 points d'écart des Conservateurs, tout serait en jeu : en Angleterre, il y a un effet de retour vers le gouvernement dans les derniers jours d’une campagne qui vaut bien 4 points. Mais, même si un des sondages les mettait à 4 points près de leurs adversaires, les autres affichaient plutôt 6 à 10. Tout peut bien se produire pendant la dernière ligne droite, et les sondages sont tres volatiles en ce moment, mais pour l’instant les choses vont plutôt mal pour Gordon Brown.

Au point où il y a des moments où les dirigeants travaillistes semblent avoir déjà un peu jeté l’éponge. Lors d’une conférence de presse dimanche dernier – et évidemment personne ne veut faire des conférences de presse le dimanche – le gouvernement n’a trouvé aucun membre du Cabinet (équivalent du Conseil de Ministres) pour le représenter – donc pas de ‘Secretary of State’ (équivalent d’un Ministre), que des ‘Ministers’ (équivalents, évidemment, d’un secrétaire d’état).

Ed Balls, ‘Minister’ des Ecoles, faisait un discours, et sa femme, Yvette Cooper, ‘Minister’ des Retraites et de l’Emploi, l’écoutait (théoriquement) avec Liam Byrne, ‘Minister’ au ‘Treasury’, le Ministère des Finances.

C'est compliqué, tout ça, n'est-ce pas ? Si seulement les Français pouvaient se résoudre à parler anglais comme tout le monde.

Tout à coup, les journalistes présents (pas très nombreux) voient Cooper glisser à Byrne un mot scribouillé sur un bloc notes, tout comme une petite écolière mal élevée. Un photographe réussit à prendre en photo le bloc à la fin de la conférence – qui d’ailleurs se termine avant l’heure prévue et après seulement trois questions de la part des journalistes. Et le message semble bien confirmer l'impression de conduite digne d'une lycéenne.

‘C’est la Ligue 2 aujourd’hui, c’est sans doute à cause de ça qu’on nous permet de faire ça,’ avait-elle écrit a son voisin de classe.

Et Byrne répond : ‘Eh, oui, c’est comme si ils nous permettaient de jouer dans le bac à sable.’

Voilà ce qui s’appelle une vraie ambiance de fin de règne.

Friday, 26 March 2010

Ebats et débats : le charme de la politique française

La politique française est peuplée, comme tout le monde sait, de personnages extraordinaires, qui nous étonnent sans cesse par leurs qualités intellectuelles et morales. Je fais, bien sûr, une place spéciale à notre grand président de la République – qui ne pourrait pas en faire autant, face à quelqu’un d’une taille pareille ?

Cependant, je dois avouer que dernièrement une autre est venue souffler la place dans mes affections qui devrait lui revenir tout naturellement. Une de ces rares personnes qui arrivent à cumuler une réussite frappante dans deux domaines bien différents, en l’occurrence la politique et le sport de haut niveau.

Je parle, bien sûr, de notre secrétaire d’Etat à l’Ecologie et championne en titre de karaté par équipe, Chantal Jouanno.

Or vous vous imaginerez bien que j’étais profondément inquiet d’apprendre que mardi dernier elle était au ‘désespoir’ face à une décision du gouvernement dont elle fait partie.

C’était le surlendemain des régionales et le premier ministre François Fillon avait annoncé une légère retouche à la politique environnementale de son gouvernement. Ils avaient prévu d’introduire une taxe au carbone, pour mieux protéger l’environnement, et maintenant, ben, non, ils n’allaient plus l’introduire, au moins pas tant qu’il n’y ait pas d’initiative dans ce sens au niveau européen.

C'est-à-dire que l’idée était renvoyée aux calendes grecques.

Ben, quoi ? Protéger l’environnement c’est beau, soit, mais il faut bien aussi protéger les espèces en péril, et à la suite des régionales, une menace sérieuse planait sur l’avenir de l’espèce ‘Président de la République UMP’.

Mais Chantal n’a pas apprécié. Elle était ‘désespérée de ce recul et désespérée que ce soit l'écolo-scepticisme qui l'emporte’, a-t-elle déclaré.

Une perspective affreuse s’ouvrait devant nous. Allions-nous perdre notre Chantal nationale ? Démissionnerait-elle ? Nous avions tous chaud.

Mais elle nous a rassurés le lendemain même. Elle a fait preuve de toute la force morale qu’on pourrait attendre chez elle. Elle a compris qu’il y a des principes qu’on peut, au besoin, défendre ou ne pas défendre, et la protection de l’environnement en est un. Par contre, il y a certains principes auxquels il faut se cramponner, qu’on ne peut jamais abandonner. Elle a choisi de défendre le principe selon lequel, étant donné qu’il faut bien que quelqu’un occupe son poste au Ministère de l’Environnement, tant qu’à le garder elle-même.

Elle n’a pas démissionné. Après tout, la taxe au carbone, on peut en faire une autre n’importe quand. Mais une championne de karaté au gouvernement ? Cela ne se produit pas tous les jours.

Ceci dit, elle n’est pas complètement sortie de danger pour l’instant. Sarko-le-grand lui a lancé une déclaration bien sèche, ‘Il y a une stratégie, elle a été fixée par François Fillon et par moi-même, que chacun s'y tienne’. Le karaté, est-ce que Chantal en a tiré une leçon suffisante de flexibilité ? Elle n’en a certainement pas tiré la force nécessaire pour faire face au Président, surtout pas ce géant d’un Président que nous avons aujourd’hui.

Espérons que tout se terminera bien.

Entretemps, un autre grand acteur de la scène politique actuelle m’a également fait plaisir cette semaine. Il s’agit de la belle et digne Carla Bruni. Nous avons, ici en Angleterre, une chaîne de télévision, Sky News, qui jouit de toute la réputation de qualité qu’on pourrait attendre d’une composante de l’empire médiatique de Rupert Murdoch, dont on connait l’engagement envers tout ce qui est droit et sérieux dans le monde de l’information. Face aux commérages véhiculés cette semaine par les parties les plus scabreuses de la presse étrangère, y compris en Angleterre, sur les supposés troubles du couple présidentielle, Carla a sorti un démenti formel sur Sky News. Elle a affirmé que jamais son mari Sarko ne la tromperait.

On est bien soulagés, n’est-ce pas ?

Heureusement, je ne suis pas de ceux qui seraient capables d’imiter l’indiscrétion de la presse anglaise en nommant la personne qui aurait été liée avec Sarko. Et je ne ferai bien sûr pas la moindre allusion aux propos vénéneux et symétriques faite à l’égard de Carla même. Je me contenterai de déclarer mon plaisir à apprendre la fausseté de ces bruits indignes.

Surtout que jamais je n’aurais souhaité à Carla une rivale experte dans un sport de combat. Ni à Sarko une maîtresse avec laquelle il serait un peu brouillé sur le plan politique.

Monday, 22 March 2010

Le 21 mars: deux exploits pour la France – le printemps débute bien

D’abord, c’était les régionales, où la France semblait vouloir dire à Sarkozy qu’il faut plus qu’une jolie femme pour faire un grand Président.


Je dis ‘semblait’ puisqu’il n’y a qu’une toute petite majorité du peuple qui se soit exprimée. A l’intérieur de cette petite majorité, une belle majorité a voté à gauche. Malheureusement, cependant, aucun parti a réussi un aussi beau score que celui des abstentions.


Peut-on tirer grand’ chose de cela pour les présidentielles de 2012 ? On commence à parler de Martine Aubry comme la Merkel de la France. Malheureusement, si par le physique elle se rapproche beaucoup plus d’Angela que de Rachida Daty, par exemple, du point de vue de la finesse politique elle ressemble beaucoup plus à Daty qu’a Merkel. Si elle est plus à gauche, elle est moins adroite.


Et l’autre exploit de la France ? Mais le grand chelem des Six Nations, bien sûr. Bien mérité, d’ailleurs. La France a fait trois matchs magnifiques, un match un peu chanceux (contre le Pays de Galles) et un match juste suffisant – la victoire par deux points sur l’Angleterre, où c’est elle qui a encaissé le seul essai. Pour les quatre autres matchs, il aurait été injuste qu’elle rate le chelem à la dernière étape ; par contre, elle a vraiment du mal, n’est-ce pas, à s’imposer contre l’Angleterre… Sa bête noire, évidemment.






Postscriptum : un autre exploit. L’Alsace a résisté à la vague socialiste qui s’est répandu sur le reste de l’Hexagone, et même jusqu’en Corse. Mais à Strasbourg, ville exceptionnelle de cette terre d’exception, ils ont su compenser la bêtise de leurs concitoyens de région : l’invité spécial du Printemps des Bretelles de cette année a été Marcel Loeffler. Ce nouveau Django Reinhardt, à l’accordéon plutôt que la guitare, nous séduit depuis des années avec sa musique Manouche, son Jazz, ses Tangos. Heureusement que sa ville natale a su l’honorer comme il faut. On peut quand même parfois être prophète dans son propre pays.


Et c'est encore un bon présage d'un beau printemps.

Tuesday, 16 March 2010

Cinéphile, pédophile - faisons la part des choses

Quelle magnifique visite à Strasbourg, il y a deux weekends ! On a vu des amis excellents, on a imbibé des boissons superges, on a consommé des plats extraordinaires et qui montrent, encore une fois, que même si la nourriture s’améliore rapidement en Angleterre, il reste beaucoup plus facile de maintenir un régime dans notre ile que dans l’Hexagone.

Nous avons même vu deux films an langue anglaise. C’était curieux de devoir aller à Strasbourg pour les voir, mais notre petit bourg de Stafford en Angleterre n’offre tout simplement pas le choix de films, même anglophones, qu’on trouve à Strasbourg. Belle ironie.

Un des films était Ghost Writer, le dernier de Polanski. J’ai beaucoup apprécié le roman, par Robert Harris.

J’ai été étonné par le nombre de spectateurs remplissant la salle de cinéma à Strasbourg. Le sujet est très anglais, ou américain – il tourne autour d’un ancien premier ministre britannique qui a eu l’idée saugrenue d’envahir l’Iraq pour faire plaisir à un Président de Etats-Unis méprisé par tout le monde. Pour que nous n’identifiions pas ce personnage de fiction avec un premier ministre historique, il s’appelle Adam Lang et certainement pas Tony Blair.

A propos, j’ai toujours apprécié Olivia Williams, qui joue Ruth Lang, l’épouse. Elle est plus jolie que Cherie Blair (ce n’est pas dire grand’ chose) mais elle joue le personnage à merveille, recréant exactement ce mélange de sorcière et de manipulatrice qu’est devenue Cherie aux yeux du public anglais.

Mais tout cela est très anglo-anglais. Pourquoi les Français s’y intéressent tant ? Une amie qui nous a accompagné nous a expliqué la raison – c’est le côté Polanski. En parlant avec mes amis j’ai été étonné du degré de solidarité que bon nombre de Français expriment à son égard.

Or dans le monde anglo-saxon, les opinions se partagent entre ceux qui croient que la simple justice naturelle exige de le jeter en taule jusqu’à la fin de ces jours, et ceux – dont moi – qui croient que cela ne servirait à rien. Mais ni les uns ni les autres ne croient que Polanski soit la victime d’une injustice méritant une quelconque solidarité de la part du public. A mon avis, il y a peu d’autres gens qui verraient leur cas traité avec autant d’indulgence s’ils étaient condamnés pour pédophilie, comme lui, ni en France ni ailleurs.

Il me semble donc étrange qu’il y ait ce sentiment de solidarité envers lui parmi les Français. Faut-il conclure que d’autres règles s’appliquent à un voyou issu d’un milieu désavantagé qu’à un réalisateur de grands films ?

Ou même, étant donné qu’il s’agit de Polanski, à un réalisateur de films médiocres avec de temps en temps un qui soit mieux que les autres ?

Dont Ghost Writer, à propos. Je vous le conseille. Mais en tant que film, plutôt qu’en tant qu’expression de solidarité.

Sunday, 7 March 2010

L'Ecologie, ça se respecte

C’est passionnant de revenir en France quelques jours, voir un peu quelle tournure les choses ont prise sur le terrain.

J’ai surtout été étonné par l’omniprésence de la photo de Sarko-le-Grand. En passant, disons que j’étais déçu d’apprendre qu’un de mes amis a pris l’habitude de l’appeler ‘le nain’. C’est très injuste envers un homme qui fait tout pour prouver sa grandeur.

Il faut avouer, qu’avec le chômage qui dépasse la barre fatidique de 10%, à part ses photos, notre grand président ne peut pas vraiment se vanter de grand chose comme réussite récente.

C’est pourquoi je salue avec enthousiasme le triomphe du Ministère de l’Ecologie. Déjà le Ministre, Jean-Louis Borloo, est peut-être le seul membre du gouvernement capable de faire sourire de temps en temps par ces bons mots (par exemple, ‘Sarkozy, c'est le seul qui a été obligé de passer par l'Elysée pour devenir premier ministre’, qui me semble bien résumer en une seule phrase le problème central du gouvernement actuel).

Mais ce Ministère a d’autres talents, en particulier au niveau des Secrétaires d’Etat. Comme je l’ai signalé la semaine dernière, Chantal Jouanno, douze fois championne de France en Karaté individuel ou en équipe, devait se remettre en lisse pour le championnat de France de karaté par équipe ce weekend.

Résultat ? A quarante ans, et avec deux co-équipières de 44 et 51 ans, elle a réalisé l’exploit et remporté le titre aujourd’hui 7 mars. Quand elle regagne son poste demain matin, elle le fera en tant que championne de France pour une treizième fois.

Tête de liste de l’UMP pour les régionales de Paris, elle a tout ce qu’il faut pour se défendre d’adversaires tentés de la prendre à la légère. En plus, si la France ne fait pas toujours très bonne mine dans le monde de la Défense militaire (on pense, par exemple, aux difficultés liées à la mise en service du porte-avions Charles de Gaulle), dans le domaine de l’Ecologie elle a évidemment de quoi se faire respecter.

Sunday, 28 February 2010

L'Etat et le gâchis de ses talents

Pendant la guerre – la deuxième, mondiale – ma mère a fait la connaissance d’un jeune réfugié juif de l’Europe de l’Est.

Comme bon nombre de Juifs de ce coin du monde, il était polyglotte. Il parlait, bien sûr, sa langue maternelle, le Yiddish. Il parlait, par pure nécessité, la langue de l’oppresseur. En l’occurrence, il s’agissait de deux langues puisque la géographie (ou faut-il parler plutôt d’histoire ?) à géométrie variable de la région avait comme conséquence des changements fréquents d’oppresseurs : il avait donc appris et le Russe et le Polonais. Et, étant donné qu’ils n’étaient jamais loin, il avait appris également à s’entretenir avec les Allemands.

De surcroît, le désir de tout son peuple de trouver un jour une terre d’asile l’avait poussé à apprendre en plus le Français et l’Anglais. Il maîtrisait donc six ou sept langues, et quand je dis ‘maîtriser’, je veux vraiment dire maîtriser : il ne s’agissait pas de connaissances rudimentaires, ne lui donnant que la capacité de se commander à manger dans un bistro.

Le fonctionnariat anglais l’a accueilli avec plaisir lorsqu’il est arrivé en Grande Bretagne. Mais loin de l’affecter au Ministère des Affaires Etrangères, ces chefs n’ont rien trouvé de mieux pour lui que le Ministère de l’Agriculture, l’Alimentation et la Pêche. Il s’y est ennuyé pendant toute la guerre.

On a parfois du mal à s’expliquer les critères animant la décision de nommer des gens à un poste plutôt qu’à un autre. Parfois, pourtant, on a beaucoup moins de mal – par exemple, pour comprendre la nomination de Mara Carfagna, ex-vedette de la porno soft, au poste de Ministre de l’Egalité en Italie, il suffit de réfléchir au caractère du chef du gouvernement et regarder la photo de la Ministre. Certaines photos, en tout cas.

En France, je me suis souvent demandé si Rachida Dati devait son bref passage au poste de Garde des Sceaux à des qualités intellectuelles, à sa compétence, plutôt qu’à des aspects peut-être moins utiles mais plus visibles. Moins utiles, en tout cas, pour l'administration de la justice.

Toutes ces belles questions me sont revenues à l’esprit cette semaine lorsque j’ai appris que Chantal Jouanno allait défendre son titre de championne de France en karaté par équipe. Une semaine plus tard, le 14, elle se présente en tête de liste UMP pour les élections régionales à Paris, ville qu’elle connaît évidemment à fond, ayant déclaré le 21 janvier qu’elle souhaitait voir automatisé la ligne 14 du Métro, automatisée depuis son ouverture en 1998.

Quand ses autres occupations le lui permettent, Jouanno occupe aussi un poste au gouvernement de Sarko-le-Grand.

Ce qui m’a le plus surpris chez elle, et qui m’a fait penser à l’ami de ma mère, était d’apprendre la fonction qu’elle joue au Gouvernement. Elle est secrétaire d'État chargée de l'Écologie.

L’Ecologie ? Une championne de Karaté ? Et pourquoi n’est-elle pas au Ministère de la Défense ? Autrefois, on décidait parfois l’issu des batailles par combat singulier. On sait, qu’en équipe en tout cas, elle est indomptable (en France, et au moins jusqu’à la semaine prochaine).

Quel gâchis. Mais le gaspillage des talents est vraiment une caractéristique essentielle, depuis toujours, de toutes les administrations publiques.

Sunday, 21 February 2010

Las Malvinas son francesas

Ça va pas à nouveau entre la Grande Bretagne et l’Argentine. Les Anglais veulent chercher du pétrole près des Iles Malouines. Les Argentins maintiennent leur revendication de souveraineté sur ces îles – ils ne se fatiguent pas de crier ‘Las Malvinas son Argentinas’.

En représailles du projet pétrolier, ils veulent imposer des redevances spéciales sur tout navire dans un port Argentin qui aurait transité par la zone contrôlée par la Grande Bretagne. La tension monte.

Cela me paraît profondément injuste. Ces petits rochers de l’Atlantique du Sud nous ont déjà fait faire une fois la guerre. J’ai l’impression qu’ils ne sont jamais satisfaits, ces Argentins. Leur victoire de 1982 ne leur suffit pas ? Grâce à cette guerre, l’Argentine s’est débarrassée d’un gouvernement autoritaire de droite ; grâce à la même guerre, nous avons été condamnés à subir le nôtre encore huit ans, jusqu’à la chute de Thatcher en 1990. Nous n’en voulons pas à l’Argentine, mais elle pourrait du moins avoir la générosité de nous épargner un renouveau de ce conflit. Nous avons déjà assez payé.

D’ailleurs, moi j’ai toujours prôné une solution que je trouve originale et intéressante du problème des Malouines. Mon idée se résume sous le slogan ‘les Malouines aux Malouins’. C’est eux qui ont eu la mauvaise idée de coloniser ces îles ; qu’ils en prennent de nouveau la responsabilité. Elles pourraient devenir un prolongement territorial de la région Bretagne, ou même de la ville de St Malo.

Et quel plaisir cela ferait à Sarko-le-grand ! Un nouvel ajout à l’Empire français. Un renversement de la tendance historique. Vous ne le voyez pas glisser sa main droite sous sa veste ? Là il aurait vraiment de quoi se mettre sur la pointe des pieds.

Friday, 12 February 2010

C'est parti pour un autre grand tournoi

L’année se décompose en moments charnières. Un s’est produit hier quand, sans partir tôt, j’ai quitté le bureau sous la lumière du jour pour la première fois depuis l’automne.

Mais un autre moment que j’attends avec impatience tous les ans depuis Noël c’est le début du Tournoi des Six Nations, qui a eu lieu le weekend dernier. C’est la grande compétition du rugby international, bien plus importante que la Coupe du Monde, et si elle produit souvent d'autres matchs passionnants et pleins de tension, celui qui compte le plus pendant ces six semaines magnifiques, s’est le clash Angleterre-France. Ou France-Angleterre, à Paris, comme ce sera le cas cette année.

Ce sera d’ailleurs le tout dernier match, dans la soirée du 20 mars. J'ai donc encore cinq semaines entières pour cultiver ma hantise. L’année dernière c’était à Twickenham. J’étais dans les tribunes et j’ai donc vu l’Angleterre marquer son premier essai dans la deuxième minute, le début de ce qui est devenu plutôt une déroute qu’une défaite pour la France.

Les Bleus auront-ils leur revanche cette année ?

Qui le sait ? Samedi dernier, l’Angleterre a gagné son premier match, contre le Pays de Galles, mais n’a eu que 13 points d’avance, en ayant marqué 17 pendant la suspension d’un joueur gallois. Bon signe pour eux qu’ils ont su profiter de leur surnombre contre une équipe réduite à quatorze pendant dix minutes ; mais auraient-ils trouvé un autre chemin vers la victoire sans ce don de la part de leurs adversaires ?

Quant à la France, c’est toujours l’équipe la plus intéressante du Championnat : on ne sait jamais quelle équipe se présentera sur le terrain, même s’il s’agit des mêmes quinze joueurs. Dimanche dernier, contre l’Ecosse, nous avons vu une équipe majestueuse en première mi-temps ; en deuxième elle a fait un match nul avec l’Ecosse en 40 minutes sans grande magie, sortant gagnant du terrain grâce uniquement à leur prestation antérieure.

Que feront-ils s’ils sont obligés à jouer vraiment pendant 80 minutes ?

Toutes les questions demeurent sans réponse pour l’instant. Les cinq semaines qui viennent amèneront des éléments. Et le 20 mars, nous aurons la réponse définitive.

C’est tout le plaisir de ce grand tournoi. Un long parcours plein de surprises et de leçons. Et à la fin un grand affrontement historique. Qui aura lieu, d’ailleurs, la veille du printemps et une semaine avant le passage à l’heure d’été.

Une autre charnière. Et un autre passage vers le bonheur. Quelque soit le résultat sur le terrain.

Sunday, 31 January 2010

La sexualité féminine : perpétuelle source de soucis

Le but de ce blog est, bien sûr, de promouvoir de bons rapports entre deux grands pays, voisins de part et d’autre de la Manche (ou, comme nous disons ici, du Canal Anglais).

Il est donc désolant de découvrir que de nouvelles controverses sont venues perturber l’harmonie qui règne entre nos pays, du moins hors de la saison du championnat des six nations.

Un groupe de scientifiques à King’s College, Université de Londres, a publié il y a trois semaines les résultats d’un an de recherche sur l’existence du ‘point G’, fameuse ou peut-être mythique zone érogène chez la femme. Leur conclusion ? Navrante : c’est une ‘idée subjective’.

Chez les scientifiques français, c’est le tollé général. Comment peut-on accepter une idée si morne ? Un groupe se réunit à Paris, sous la présidence du gynécologue Sylvain Mimoun, et dénonce la froideur britannique.

Car il est évident qu’au fond il ne s’agit pas ici de science, mais de l’incapacité chez les hommes de ce froid et gris pays d’éveiller la moindre passion chez la femme. N’oublions pas l’avis de cette grande leaderine de la France, Edith Cresson – un anglo-saxon sur quatre est homosexuel et même les autres ne partagent pas le romantisme, l’esprit de chevalerie et les vues éclairées des français sur les femmes.

Convergence harmonieuse entre deux nations ? Encore des progrès à faire, me semble-t-il.

Tuesday, 26 January 2010

L'entente cordiale, les romans d'aventures et Alex Rowe

Quel bel exemple de l’entente cordiale que celui d’Alex Rowe. Né il y a 43 ans au Gloucestershire, beau comté de l’ouest de l’Angleterre, il incarne à lui seul les avantages des relatons anglo-françaises (ou faut-il dire franco-anglaises ?).

Aujourd’hui, Alex Rowe est un vétéran de la légion étrangère, adjudant-chef avec 23 ans de carrière qui l’ont amené au Golfe, en ex-Yougoslavie et en Afghanistan. Il a donné maintes fois des preuves frappantes de son courage – sa mère dit qu’il est ‘incroyablement courageux, à tel point qu’on peut le considérer comme proche de la stupidité’. Quatre fois ces exploits lui ont valu des honneurs ; le plus beau, à mon avis, était le moment où il a traversé une place sous le feu pour secourir une femme restée bloquée avec son bébé.

Il s’est encore dépassé en Afghanistan et doit, par conséquent, être reçu à la légion étrangère cet été.

Le plus beau de cette histoire ? L’armée britannique, dans laquelle son frère est soldat au génie, l’a refusé quand il avait dix-huit ans, pour cause d’une rétine détachée. Ces problèmes de vue n’ont pas empêché à l’armée française de faire de lui un excellent franc-tireur, paraît-il.

On peut tirer plusieurs conclusions de cette histoire. Une, peut-être trop mesquine même pour moi, serait que même les rejetons de l’armée britannique brillent dans une tenue française.

La version que je préfère est celle selon laquelle l’armée française n’a pas perdu sa capacité de faire des soldats exceptionnels, quel que soit la qualité des matériaux à sa disposition ou leur pays d’origine.

En plus, Monsieur Rowe prolonge une belle tradition, de soldats anglais dans la légion étrangère, célébrée entre autres par le roman de P C Wren, Beau Geste (à prononcer à l’anglaise – beu jest). C’est la légion étrangère qui permet au protagoniste de regagner son honneur et prouver son courage. Il faut avouer qu’il le fait un peu aux dépens des sujets arabes de la France, mais on ne peut pas tout avoir dans un roman d’aventure, après tout.

En tout cas, Alex Rowe nous en a donné un nouveau, bien beau, et qui ne souffre en rien du fait d’être vrai.